Égalités / Économie

Pourquoi la communication des institutions financières se féminise

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur Harvard Business Review, Boston Consulting Group, The Guardian

Selon Palema Grossman de l’agence Getty Images, l’une des principales banques d’images utilisées dans la presse et la publicité, les entreprises financières achètent 20% de plus d’images de femmes qu’il y a cinq ans, et la part des publicités représentant des hommes a décliné dans le même temps. Elle a présenté ces résultats dans le cadre d’une conférence sur l’évolution des représentations féminines à la grand-messe du numérique South By South West, en mars 2014.

Ce changement concerne autant la représentation de la clientèle des banques et institutions financières que celle de leur force de travail, précise sur la Harvard Business Review Karen Firestone, PDG d’Aureus Asset Management, un fonds d’investissement. Elle rappelle que cette évolution s’inscrit dans une tendance plus profonde: celle qui voit l’effondrement du système financier en 2007 comme la conséquence directe des comportements agressifs, impulsifs et portés sur le risque des hommes qui travaillent dans le secteur.

Ces ambiances de salles de marchés surtestostéronées, peuplées de mâles alpha sans scrupule, servent de décor à de nombreuses fictions populaires, comme récemment, le film de Martin Scorsese Le loup de Wall Street avec Leonardo Di Caprio dans le rôle du flambeur-baiseur-cocaïné survolté. Christine Lagarde n’a-t-elle d’ailleurs pas déclaré que si Lehman Brothers s’était appelée Lehman Sisters, l’économie mondiale n’aurait peut-être pas subi les conséquences dramatiques du krach de 2007?

Selon Karen Firestone, cette généralité est en partie validée par les études. Le «profil de risque» des femmes épargnantes est distinct de celui des hommes aux Etats-Unis, explique-t-elle. Un large éventail d’études se sont penchées après la crise sur le rôle des traders, leur excès de confiance en eux, leur goût pour la compétition stimulé par leurs hormones...

Un neuroscientifique de Cambridge, John Coates, d'ailleurs ancien trader, a par exemple remarqué que les femmes n’avaient pas investi dans la bulle Internet du début des années 2000. Le même John Coates et son collègue Joe Herbert ont montré dans une étude souvent citée pour illuster les dérives de la finance que les mouvements du marché financier pouvaient être corellés avec le niveau de la testostérone et de la cortisol chez les traders!

Des critiques font évidemment remarquer que ces conclusions s'apparentent à un «essentialisme» fainéant: ce sont plutôt les conditions de travail des traders et éventuellement leur mode de vie (consommation de drogues) ou leur profil psychologique particulier qui doivent être tenus pour responsable de leurs prises de risque excessives.

Selon une étude de 2009 du Boston Consulting Group cependant, une approche «genrée» de la relation clientèle serait pertinente en matière de services financiers. Les femmes interrogées étaient plus enclines à percevoir l'accumulation de richesses comme un filet de sécurité sur le long terme que comme une fin en soi. Or un tiers des femmes mariées gagnent plus que leur mari aux Etats-Unis. Et elles sont majoritaire (57% en premier cycle et 59% dans le second) chez les étudiants.

Dans ce sondage, les femmes se disaient peu respectées par leur banquier en raison de leur sexe. Le BCG appelait donc à une «approche spécialisée» pour prendre en compte ces évolutions. Et on comprend qu’au-delà de l’engagement dans la promotion de la diversité d'entreprises qui ont beaucoup à se faire pardonner, la féminisation de l’image des institutions financières est aussi un habile mouvement stratégique vers la satisfaction de leur clientèle actuelle et future.

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