Économie

Arrêtons avec l'«économie du partage»

Rien de ce que nous appelons «économie du partage» n'est du partage.

<a href="http://www.flickr.com/photos/34928082@N05/3667475713">Don´t worry, be hippie</a> / Radio Saigón via Flickr CC <a href="http://creativecommons.org/licenses/by/2.0/deed.fr">Licence By</a>
Don´t worry, be hippie / Radio Saigón via Flickr CC Licence By

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Bien que j’aime beaucoup des entreprises qui tombent sous cette appellation, je suis de plus en plus agacé par le terme d’«économie du partage» [«sharing economy»], qui est utilisé comme raccourci pour catégoriser un éventail assez divers d’entreprises, dont pratiquement aucune n’implique sérieusement le partage

Dans ces circonstances, j’ai été heureux de voir la présentation de Rachel Botsman sur le fait que l’économie du partage manque d’une définition partagée, dans laquelle elle tente de sauver le concept en adoptant une typologie plus fine.

Mais je ne pense pas que cela fonctionne. Ce terme est idiot, et il mérite de mourir.

Du plus loin que je me souvienne, tout ça a commencé avec Zipcar, qui a précédé toutes les autres entreprises et a décrit dès le début son produit comme du «partage de voiture» [«car sharing»]. Le principal problème de cette description est qu’il ne s’agit pas de partage de voiture. Zipcar n’était et n’est pas un service qui facilite la formation de coopératives d’automobilistes dans lesquelles de nombreux foyers s’associent pour posséder et partager une flotte de véhicules. Ce serait une idée économique intéressante, mais ça n’est pas ce que fait Zipcar.

La manière dont fonctionne le modèle économique de Zipcar est le suivant: une entreprise possède une flotte de véhicules et propose ces derniers à la location de court-terme à ses clients. Ils ont fabriqué l’expression «partage de voiture» parce que le marché de la location de voiture était déjà bien installé, que Zipcar voulait louer des voitures d’une manière différente et avait donc besoin d’un moyen de signaler aux gens qu’il n’était pas un concurrent frontal de Hertz.

Mais bien sûr, les choses se sont propagées. Et quand les villes ont commencé à créer des entités de location de court-terme de vélos, ces dernières ont été qualifiées d‘activités de «partage de vélo». Les choses ont vraiment empiré quand Airbnb a lancé une plateforme de location de court-terme de logement résidentiel, car les secteurs de la location immobilière comme celui de l’hôtellerie sont strictement régulés et taxés de différentes manières. Ne serait-il pas mieux de dire qu’on partage un hôtel plutôt qu’on le gère? La dernière chronique sur l’économie du partage de Tom Friedman traite d’un site Internet qui semble être une plateforme de vente de vêtements usagés.

Il s’agit pour la plupart de très bons modèles économiques. La vente de biens usagés durables a toujours joué un rôle dans l’économie, et dans la mesure où Internet abaisse les coûts de recherche et de transaction, son rôle va croître. C’est je pense d’autant plus probable pour la location.

Traditionnellement, la location avait besoin pour être viable que les biens loués soient stockés dans d’immenses entrepôts centralisés d’où ils étaient aisément disponibles. Grâce à la technologie numérique, il est à présent possible de faire ce que Zipcar fait et de disperser les voitures à travers la ville. Comme les voitures sont dispersées, elles sont plus commodes à trouver. Mais rien de tout cela n’est du partage. Mon voisin et moi partageons une pelle à neige parce que nous partageons des escaliers qui doivent être déblayés quand il neige, et nous partageons la responsabilité du travail à faire. Si j’étais propriétaire des escaliers et que je lui facturais une petite somme à chaque fois qu’il entre ou sort de la maison, ce serait l’inverse du partage.

Matthew Yglesias

Traduit par Jean-Laurent Cassely

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