Culture

«France Kbek», criss de gâchis

La nouvelle comédie de OCS avec Simon Astier parvient à décrocher quelques sourires, mais surtout des soupirs de malaise. Dommage.

Une bien belle brochette (DR).
Une bien belle brochette (DR).

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C'est en octobre dernier que la série France Kbek, diffusée dès ce lundi soir par OCS City, est rentrée dans notre collimateur via un chouette pilote accompagnant son projet de crowdfunding, hébergé sur MyMajorCompany. La société de production Love My TV espère alors récolter 10.000 euros afin «d'améliorer la valeur de production».

Le projet capote et aucun euro n'est finalement récolté via financement participatif, si ce n'est 1.777 euros en 2012 via Touscoprod, sans doute pour peaufiner le pilote. De là à coller le manque flagrant de «valeur de production» du résultat final sur le dos des internautes radins, il y a une limite que nous ne franchirons pas.

Créé par Jérémie Galan et Jonathan Cohen d'après une idée originale des actrices principales Marie-Eve Perron et Lily Thibeault, toutes deux québécoises, France Kbek raconte les déboires d'Audrey (incarnée par Perron), employée d'une boîte spécialisée dans les plaquettes (esprit de The Office, es-tu là?) et accessoirement québécoise repentie. Son tyrannique patron (Simon Astier) ayant en horreur ses compatriotes à l'accent chantant, elle se fait passer pour une bretonne et vise sans relâche la place de numéro 2 dans sa société, jusqu'à l'arrivée inopinée dans sa vie parisienne de sa meilleure amie venue tout droit de la Belle Province, qui met à mal sa couverture.

Dans France Kbek, il est aussi question d'une cellule terroriste québécoise, d'un FBI de France, d'un duo de producteurs juifs visant à enregistrer un album faisant (littéralement) bander le public et d'un chien qui parle avec l'accent pied-noir à faire passer Boule & Bill pour du Woody Allen. Oui, c'est spécial, France Kbek:

D'une générosité sans limite –mais alors vraiment sans limite, l'amateur d'humour pétomane que je suis est rassasié pour l'année– en terme de quantité de vannes débitées à la minute, la série épuise hélas plus souvent qu'elle ne fait rire. Parfois très drôle (la pseudo-cérémonie des Hot d'Or avec son instant nécrologie des «disparus» du secteur porno fait mouche), souvent très embarrassant (le personnage de patron gay incarné par Astier est sans doute la folle la plus insupportable vue sur le petit écran français depuis un bail), France Kbek manque clairement d'une vraie direction dans l'écriture.

Non pas qu'on reproche ici l'excès de loufoquerie, qui fait plutôt plaisir à voir dans une fiction française (même si la meilleure idée du show, à savoir la marionnette vulgaire servant d'exutoire, est directement pompée sur la série HBO Family Tree avec Chris O'Dowd), mais la série semble avoir été tournée sur la base de premiers jets de scénario. Comprendre: lors de la phase d'écriture d'une série, comique ou non, les scripts d'épisodes sont réécrits des dizaines de fois. Les V1 n'ont généralement pas ou peu de rapport avec le produit final, à force de rajouts, retraits, corrections, etc.

Tout porte à croire, en découvrant le résultat final, mêlant inserts d'archives détournées façon Les Nuls et gimmicks narratifs empruntés à Edgar Wright ou Bref, que le producteur Noor Sadar (déjà derrière la précédente série comique de OCS, l'inégale In America) a laissé les coudées franches aux auteurs. En temps normal, on ne s'en plaindrait pas, mais subir dix épisodes durant ce qui semble être le résultat d'un brainstorming écrit le soir d'une cuite à la Molson nous a fait un peu changer d'avis.

La fin de la saison (attention, léger spoiler en vue) laissant entendre un éventuel tournage outre-Atlantique en cas de saison 2, on espère fortement qu'au lieu de s'associer avec TV5 Monde, la production réussira à nouer un partenariat avec Radio-Canada, et ce dès l'écriture. On aurait alors limite hâte de voir la suite.

Alexandre Hervaud

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