Temps de lecture: 3 minutes
L'un des mots les plus fascinants de l’infini vocabulaire de la cuisine italienne est minestra. Il est le plus souvent utilisé pour dire «soupe», mais il peut également faire référence à une crème, à un potage, à un velouté, à un risotto et même à une assiette de pâtes.
Souvent végétale, une minestra peut néanmoins inclure des morceaux de viande fraîche ou séchée, des œufs ou du poisson. Il s’agit, en gros, du terme comprenant tout l’univers des primi piatti.
L’origine du mot est très intéressante: le verbe latin ministrare signifie «servir», et plus précisément «verser», «partager dans des bols». L’étymologie –on s’en doute un peu– est la même que celle du mot «ministre» en français, dont le sens a légèrement évolué dans le temps: en latin, cela voulait dire «serviteur».
Ce que j’aime dans ce mot, c’est que même s’il désigne un plat, il n’est pas du tout question de ses ingrédients: le mot minestra désigne un geste. Et si l'on continue à creuser le champ sémantique de ce mot, comme diraient les linguistes, on note une opposition que l'on retrouve beaucoup moins en français: la minestra est un plat à condividere («partager en parties égales»), alors qu'une volaille, par exemple, est à dividere («diviser en toutes ses parties»). Résultat: si l'on se partage une volaille, une personne aura le pilon, une autre le haut de la cuisse, et une troisième un morceau de filet. Servie à la louche, la soupe est au contraire démocratiquement la même pour tout le monde.
À la lumière de cette petite tirade historique un peu communarde, j’aimerais vous parler de deux soupes, deux recettes italiennes domestiques dont vous avez peut-être déjà entendu parler et qui se prêtent particulièrement aux premiers frimats de la saison.
La première, le minestrone, est pour les adultes et traditionnellement détestée par les enfants; la deuxième, la minestrina, est la cousine mineure du minestrone, généralement destinée aux très jeunes ou –grâce à son pouvoir réconfortant– aux adultes en difficulté.
Minestrone veut tout simplement dire «grosse soupe», et minestrina, ben, «petite soupe». Si vous avez eu ne serait-ce qu’un petit contact avec l’Italie quand vous étiez enfant, vous ne pouvez pas avoir échappé à tout ce lexique de grosses et de petites soupes.
À LIRE AUSSI La vraie recette de la soupe à l'oignon gratinée
Minestrone
J’admets qu’il y a beaucoup de découpe de légumes. Pour moi, couper les légumes pour faire un minestrone, c’est comme aller à la salle de sport: il faudrait le faire, mais je n'en ai jamais le courage.
Pour deux personnes en plat, pour quatre en entrée
- 1 petit oignon
- 1 carotte
- 1 gousse d’ail
- 1 branche de céleri avec ses feuilles
- 3 cuillères à soupe d’huile d’olive
- 1 verre de vin blanc
- 1 cuillère à soupe de concentré de tomate
- 2 feuilles d’une grande blette
- 1 boîte de haricots cuits
- 1 petite courgette
- 10 petites feuilles d’épinards
- 3 litres d’eau claire
- Sel et poivre du moulin
- 1 cuillère de parmesan râpé (facultatif)
Coupez finement l’ail, l’oignon, la carotte et la branche de céleri, et mettez-les dans une grande cocotte en fonte avec deux cuillères d’huile.
Séparément, hachez grossièrement les épinards, les blettes, les feuilles de céleri et coupez la courgette en cubes; pour l’instant, gardez tout ça dans un saladier.
Commencez à faire revenir à feu doux les carottes et compagnie, jusqu’à qu’elles deviennent tendres et translucides.
Rajoutez le concentré de tomate et mélangez. Au bout d'une minute, déglacez avec le vin blanc. Laissez évaporer l’alcool, puis rajoutez tout le contenu du saladier.
Faites faner un peu les feuilles pendant deux minutes, puis rajoutez l’eau froide et un peu de sel. Laissez cuire au moins quinze minutes après ébullition.
Laissez reposer dix minutes, goûtez, rajoutez sel et poivre et regoûtez. Servez dans deux grandes assiettes creuses ou quatre petits bols, avec un filet d’huile, des croûtons de pain et éventuellement un peu –ou beaucoup– de parmesan râpé.
À LIRE AUSSI La vraie recette du risotto de Tommaso Melilli
Minestrina coi riccioli d’oro
Tommaso Melilli
Littéralement, c’est une «petite soupe aux boucles d’or»: quand on rajoute le jaune d’œuf en fin de cuisson et que l'on remue, il se défait en plein de petits filaments dorés.
Pour deux petites personnes, en plat
- 1 carotte
- 1 petit oignon
- 1 pomme de terre
- 1 branche de céleri avec ses feuilles
- 2 jaunes d’œuf
- 2 cuillères à soupe d’huile d’olive
- 2 cuillères à café de sel non raffiné
- Plein d’origan séché, plus tous les parfums que vous voulez: noix de muscade, poivre, basilic, aneth, etc.
Coupez grossièrement tous les légumes et cuisez-les dans une casserole avec un litre d’eau, le sel, l’origan et tous les aromates que vous avez choisis. Cuisez à frémissement pendant quinze à vingt minutes.
Entre-temps, ouvrez les œufs et séparez les jaunes des blancs (gardez les blancs pour autre chose). Baissez le feu au minimum et ajoutez les deux jaunes dans la soupe. Attendez une minute, puis mélangez vite le tout avec une fourchette pendant une autre minute.
Divisez dans deux bols et rajoutez un généreux filet d’huile sur chacun. Servez chaud.