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Quand on me demande où et comment j’ai appris à faire la cuisine, généralement je réponds que j’ai fait une fac de lettres. J’imaginais de travailler dans l’édition, ou dans la presse, ou à l’université, mais secrètement je rêvais d’écrire.
Sans avoir le courage de l’admettre à voix haute, j’essayais quand même de me tenir le plus près possible des gens qui écrivaient. Comme quand on est adolescent, qu'on sort en boîte pour la première fois dans la vie et qu'on n'a absolument pas le courage d’approcher la personne qui nous plaît pour danser avec elle. Alors on essaie quand même de danser, parce que sinon on ne saurait pas quoi faire, mais on le fait tout seul, en tournant timidement autour de cette personne. On n'ose même pas imaginer de danser «avec», mais le fait de danser «à côté» nous suffit largement pour être heureux.
Depuis environ mes 15 ans je rêvais d’écrire. Et, évidemment, je ne le faisais pas.
Puis, je ne sais pas bien comment, je me suis retrouvé en cuisine et j’en suis plus jamais sorti. J’ai assez vite coupé tous les liens que j’avais avec mon ancien monde, et j’ai mis tout mon cœur à découvrir le nouveau.
Et là, il s’est passé une chose: j’ai commencé à écrire et à raconter ce monde que je découvrais au jour le jour. Il y a cinq ans j’ai commencé à écrire un bouquin qui devait parler de manger, de faire à manger, des gens qui mangent et idéalement dire tout ce qu’il y avait à dire sur ces sujets fort volumineux.
Au début, tout avait l’air d’être très clair, je pensais m’en sortir en quelques mois, et terminer et publier le livre assez vite. Je me trompais, mais c’est une des joies du dilettantisme: on apprend vite, on en parle à tout le monde et on croit tout savoir déjà; on est tellement frappé par les couleurs qu’on n'arrive même pas à imaginer qu’il y a tout un tableau derrière. Après cette petite lune de miel, ça devient plus chiant: il faut apprendre à lever en filets un thon de 20kg, à faire des sauces complexes, à cuire un pigeon, mais il faut aussi apprendre que parfois on doit faire très simple, parce que savoir cuisiner une bonne assiette de pâtes en moins de dix minutes peut être plus difficile que cuire un pigeon.
Ce long excursus existentiel avait pour but, entre autres, de vous dire que ce bouquin-là sort aujourd’hui. Ce n’est vraiment pas à moi de dire si je suis arrivé à y faire simple et à voir le tableau; cela dit, je crois pouvoir vous donner deux recettes de pâtes qui sont prêtes en moins de dix minutes.
Fusilli alla crudaiola
Photo: Tommaso Melilli
On ne peut même pas parler d’une «sauce» dans ce cas, c’est presque un ready-made. C’est un plat un peu maudit, parce que c’est un peu l’ancêtre de toute salade de pâtes froide, et c’est franchement dur de rendre cool une salade de pâtes. Mais si c’est dur de la rendre cool, c’est aussi très facile d’en manger, parce que c’est frais et très rapide à faire. Dans les Pouilles on rajoute de la ricotta sèche, ou du «cacioricotta», une sorte d’hybride entre la ricotta et le parmesan. Si vous en trouvez, tant mieux, sinon utilisez quelques cuillères de ricotta fraîche.
Pour deux personnes, en plat:
200 g de fusilli, ou n’importe quel autre format de pâtes courtes
400 g de tomates cerises ou datterino, coupées en quatre
200 g de ricotta (voir plus haut)
Plein de basilic frais
1 pincée d’origan séché
4 cuillères d’excellente huile d’olive
1 gousse d’ail, écrasée
Poivre du moulin
Chauffez de l’eau dans une grande casserole, jusqu’à ébullition et salez. On va le dire une fois pour toutes: pour cette recette, comme pour presque toute recette de pâtes, comptez un litre d’eau et 10g de sel pour 100g de pâtes. Plongez les pâtes dans l’eau et mettez dans un grand saladier l’huile, les tomates, le basilic, l’origan et l’ail; mélangez et poivrez généreusement.
Égouttez les pâtes suivant cette règle: si c’est marqué en italien, suivez le temps qui est écrit sur le paquet, si c’est écrit en français faites ce qui est marqué sur le paquet moins deux minutes. Donc, égouttez, posez dans le saladier, mélangez un peu, et servez chaud, tiède, ou froid, avec une grosse cuillère de ricotta par dessus.
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Spaghetti burro e odori
C’est une recette un peu plus confidentielle, qui a une élégance que j’aime beaucoup. «Burro e odori» signifie, tout simplement, «beurre et parfums». Il n’y a pas vraiment de recette, parce que tout dépend des aromates que vous trouvez et que vous voulez y mettre: il peut s’agir d’herbes fraiches finement hachées, d’aromates ou de graines séchées, ou un mélange des deux. Plus on en met, mieux c’est. Si vous avez accès à des plantes aromatiques dans le jardin, évidemment, ce plat devient un incontournable hebdomadaire.
Photo: Tommaso Melilli
Petit rappel, parce que on ne sait jamais: si vous mettez du laurier ou de la verveine, il ne faut ni les hacher ni les manger, mais elles donnent du goût quand même!
Pour deux personnes, en plat:
200 g de spaghetti
Plein d’herbes fraîches ou séchées au choix: basilic, aneth, romarin, sauge, origan, marjolaine, cerfeuil, menthe, laurier, thym, verveine, persil, oseille, basilics bizarres, et ainsi de suite
60 g de beurre demi-sel
Plein de poivre du moulin
Mettez l’eau à bouillir et salez à ébullition comme plus haut. Hachez les herbes finement, au couteau ou dans un petit mixeur. Gardez une demie louche d’eau de cuisson, puis égouttez les pâtes. Remettez les pâtes dans la casserole, avec les aromates, le beurre, le poivre et l’eau de cuisson. Couvrez, laissez couvert quatre minutes, puis mélangez et servez, en parsemant de parmesan râpé si vous le souhaitez.